HILDEGARDE VON BINGEN

Hildegarde de Bingen

1098-1179

Canonisée et proclamée Docteur de l'Eglise en 2012 par Benoît XVI

Propos tirés du livre "Heureux les simples", Jean-Marie Pelt, éditions Flammarion, 2011.

 

 

Elle est à l'Allemagne ce que Jeanne d'Arc est à la France. Mais sur un autre plan. Hildegarde Von Bingen n'est pas comme tout le monde. A l'âge de 5ans, enfant d'une famille de noble extraction, étonne se nourrice en lui décrivant le pelage tacheté d'un jeune veau qu'elle discernait alors qu'il était encore dans le ventre de sa mère. Et à la naissance de l'animal, il s'avère être conforme à la description.
Elle explique à l'âge de trois ans déjà qu'elle voyait ce que d'autres ne voient pas. A l'âge de 43 ans elle reçoit l'ordre de Dieu de transmettre et communiquer ses visions. Elle écrit :

"Voici que dans la quarante-troisième année de ma course temporelle, alors que je m’attachais avec beaucoup de crainte à une vision céleste, toute tremblante d’attention, je vis une très grande splendeur dans laquelle une voix se fit entendre du ciel, me disant : "Ô homme fragile, cendre de cendre, pourriture de pourriture, dis et écris ce que tu vois et entends. Mais parce que tu es timide pour parler et peu habile pour exposer et peu instruite pour écrire des choses, dis et écris non selon la bouche d'homme, ni selon l'intelligence d'une invention humaine, ni selon la volonté de composer humainement [...] mais selon la volonté de Celui qui sait, voit et dispose toute chose dans le secret de Ses mystères. [...] Une lumière de feu, d'une extrême brillance venant du ciel ouvert, fondit sur mon cerveau tout entier et tout mon corps, et toute ma poitrine comme une flamme qui cependant ne brûlait pas, mais qui par sa chaleur enflammait de la façon que le soleil chauffe ce sur quoi il darde ses rayons."

Et de nouveau elle entendit une voix au ciel qui disait : "Dis donc ces merveilles et écris-les telles qu'elles te sont enseignées et dites."

En 1106, ses parents la confient à une moniale bénédictine, abbesse du monastère féminin de Disibodenberg, près du Rhin. (Hildegarde était le dixième enfant de la famille, et selon l'Ancien Testament, il faut consacrer le dixième de ce que l'on a à Dieu... la dîme). C'est au couvent qu'elle est éduquée et qu'elle souffre (elle est très souvent malade, et surtout avant une vision). Maladie-vision-guérison. Les médecins aujourd'hui parleraient d'hystérie.
Elle mène une vie simple jusqu'à la mort de la mère supérieure, Jutta von Sponheim, et lui succède. Hildegarde Von Bingen est maintenant abbesse, à 38 ans.
Elle prend grand soin de ses moniales. Avec beaucoup de discernement, un équilibre juste, des soins, de l'écoute.

Pendant ce temps elle continue à avoir des visions qu'elle consigne dans un ouvrage qu'elle baptise Scivias, du latin Sci vias Domini, "Sache les voies du Seigneur".
Elle met 10 ans à achever le Scivias, jusqu'en 1151.

Au coeur des révélations notées dans le Scivias et les autres ouvrages qui suivront : le rapport entre l'Homme et la Nature. Elle prophétise déjà le déséquilibre que nous connaissons aujourd'hui. "Maintenant, tous les vents sont remplis de la pourriture du feuillage, l'air crache de la saleté à tel point que les hommes ne peuvent même pas ouvrir la bouche comme il faut, la force verdoyante s'est fanée à cause de la folie impie des foules humaines aveugles..." "La Terre ne doit pas être blessée, la Terre ne doit pas être détruite. Chaque fois que les éléments de la Terre seront violés par de mauvais traitements, Dieu les purifiera par des souffrances, par des tribulations du genre humain. Toute la Création est donnée par Dieu à l'humanité pour qu'elle l'utilise. Mais, en cas d'abus de ce privilège, la justice de Dieu permet à la Création de punir l'humanité."

Visionnaire, poétesse, prophétesse, écologique, Hildegarde Von Bingen est aussi thérapeute, médecin, avant que ce mot ne soit réservé aux détenteurs d'une formation adaptée (la seule univertsité à cette époque est à Salerne, en Italie). Sa médecine soigne.

Mais pour notre sujet, Hildegarde Von Bingen est aussi musicienne. Elle a composé plus de soixante-dix chants et hymnes dont certains ont été interprétés et enregistrés par des ensembles de musique médiévale contemporaine.

A la fin de sa vie, elle prêche dans les cathédrale, à Cologne, à Trèves, à Metz, privilège pourtant réservé aux hommes.

Elle meurt le 17 septembre 1179 à 82 ans.

Biographie : Régine Pernoud, Hildegarde de Bingen, LGF, coll. "Le Livre de Poche", 1996

Pour écouter sa musique et revenir sur sa biographie :

https://www.francemusique.fr/culture-musicale/hildegard-von-bingen-10-petites-choses-que-vous-ne-savez-peut-etre-pas-sur-la-compositrice-65643

Un autre exemple musical de la même période à découvrir : Herrade De Landsberg (ou Herrade de Hohenbourg), 1125-1195, qui a vécu au Mont Saint-Odile et qui a écrit l'Hortus Déciliarum (le jardin des délices). C'est la première encyclopédie connue qui ait été réalisée par une femme. Cet ouvrage en latin résume les connaissances théologiques et profanes de l'époque.

https://www.autour-du-mont-sainte-odile.fr/2015/05/herrade-de-landsberg-et-la-musique-dans-l-hortus-deliciarum.html

 

Brigitte Lesne, chanteuse spécialisée de la période médiévale, propose plusieurs oeuvres de Hildegarde von Bingen et Herrade de Landsberg sur ce disque :